
Le nouveau "Plan européen de l'eau" de la Commission. Le droit humain à l'eau pour la vie totalement ignoré. Triomphe des intérêts productifs.
« Clean water is part of the natural capital on which health, well-being and our economy depend »
C'est en ces termes que commença la présentation du Blueprint for
Europe’s Waters, la future politique européenne de l'eau par
P. Gammeltoft, membre de la direction générale – DG –
environnement de la Commission européenne. Ce programme, véritable
« milestone for water
» comme la Commission aime
le rappeler, s'inscrit dans le cadre de « Europe 2020
»,
la stratégie de croissance économique européenne, et aurait
vocation à s'inscrire dans le long terme – il est ainsi même
question de 2050.
La Commission européenne a décidé de considérer l’eau uniquement comme un « capital naturel » dont dépend l'économie européenne. Dès lors, elle ne fait pas la moindre référence au droit à l'eau. Certes, dans sa première phrase introductive, elle reconnaît que la santé et le bien-être, sur un pied d'égalité avec l'économie, dépendent de l'eau. Mais réduisant l'eau exclusivement à sa dimension de « capital naturel » exploitable pour l’économie, il était difficile d'en attendre plus de sa part.
Ainsi,
l’objectif
principal du Plan est de « securing the availability of good-quality water for sustainable and equitable use
»Powerpoint Presentation « Blue Print to safeguard european water resources », P. Gammeltoft, Parlement européen, Water-group, 14/11/2012 : « Goal = Sustainability of all activities that impact on water, thereby securing the availability of good-quality water for sustainable and equitable use.
(nous soulignons) »..
Les mots utilisés sont des plus équivoques. Il convient de
se tourner vers les mesures concrètes proposées,
une cinquantaine, pour mieux comprendre la vision de la
Commission.
Fréquemment, la Water industry est évoquée oralement comme devant prendre part à la mise en oeuvre de ces propositions ; son rôle reste flou. Nulle part, cependant, n'apparaît la moindre référence aux « citoyens » et à une participation citoyenne dans la définition et la mise en oeuvre de ces politiques. Les sujets mentionnés sont les Etats membres et les porteurs d’intérêts – stakeholders – ces derniers occupant la place centrale dans la réalisation de la politique européenne de l’eau. Pour cette raison, les mesures centrales privilégiées par le Plan sont celles concernant la gestion économique marchande et industrielle de l’eau, à savoir le water-pricing. Le principe du full cost-recovery est à nouveau consacré comme le fondement du système de gestion de l’eau européenne.
Deux
références rapides, sans aucune autre explicitation concrète,
terminent l’exposé sur les mesures proposées : la première
sur les engagements internationaux de l’Union européenne
concernant l'Objectif du Millénaire pour le Développement en
faveur de « support access to safe drinking water and basic sanitation
»
et, la deuxième, sur son soutien à la promotion du « Sustainable
Water Ressource Management »
comme principe inspirateur de la politique de l’eau au niveau
mondial, un principe affirmé en 1993 par la Banque mondiale dans
son fameux rapport « Integrated
Water Ressource Management »
devenu, depuis, la bible de l’eau de la communauté
internationale.
Certaines personnes de l'audience ont tôt fait de questionner l’absence de toute référence au droit à l'eau et à la participation citoyenne. Les réponses très évasives de la part de la DG environnement mirent fin à tout débat.